lundi 11 février 2013

Une folle vie

Le crime, les bandes, la drogue, les armes. Un quotidien infernal pour les gangs d’Amérique centrale.Notamment à San Salvador.

Le 2 septembre 2009, Christian Poveda est assiné de 4 balles dans la tête pendant un tournage avec la Mara 18. Il laisse derrière lui son dernier documentaire mexicano-français: La vida loca.
Christian Poveda, reporter et réalisateur franco-espagnol
 

On les nomme plus généralement «Maras». Une référence aux fourmis carnivores d’Amérique centrale qui détruisent tout sur leurs passages (marabuntas). Ces bandes sont nées aux États-Unis mais le gouvernement américain a décidé, en 1996, de renvoyer plus de 100 000 criminels dans leurs pays d’origines (toujours en Amérique centrale). La marche vers la paranoïa et l’enfer commence.

Les guerres civiles n’ont fait qu’accélérer ce processus de bandes. Ces personnes ont souvent aucune qualification et trouve que du travail précaire. En même temps, il est difficile lorsque l’on porte des tatouages sur presque la totalité du corps y compris le visage. Ces tatouages ont une signification précise, ils montrent l’appartenance au gang et chaque tatouage représente un crime (meurtre, viol, vol...)
A San Salvador, deux groupes s’affrontent avec violences : la Mara Salvatrucha et Mara 18. Une guerre sans fin ou l’aboutissement est souvent la prison et la mort. Ces gangs se forment surtout durant leurs séjours en prison. Ayant aucun repère, aucune identité ni familles et amis, les bandes recrutent et forment leurs futurs « soldats », qui ont souvent entre 17 et 27 ans. La prison est à double tranchant, soit elle permet l’exclusion, soit l’intégration.

Une réintégration longue et parfois difficile. Un jeune de la Mara 18 sortit de prison depuis 6 mois, a été abattu en pleine rue à coup de balles dans le dos. Il venait de sortir de la boulangerie qu’il l’avait accepté pour se réintégrer dans la société. Mais la folie des gangs l’a vite rattrapé. Une fois qu’on est tombé dedans, c’est un pied déjà mis dans la tombe. A chaque funérailles, c’est l’horreur.



Dans un cercueil à moitié couvert, après la minute de silence de minuit, le défunt est entouré des membres du gang chantant à capella la fameuse chanson «Que vaya con dios». Le gang est enfermé durant toute une nuit avec le corps du martyr pour le veiller. Les familles, amies et autres ne peuvent le voir que durant la journée. Lors de la mise en terre, c’est une pluie de cries et de pleurs qui se propagent et déchirent les oreilles.
A travers cette jungle où le crime organisé et ultra hiérarchisé s’étend, un tout autre modèle se développe. L’existence d’une famille traditionnelles naît et regroupe tous les enfants de rues, les jeunes délinquants, les filles abandonnées et maltraités. Une sorte de confrérie élit les chefs de bandes, ne dépassent presque jamais la trentaine. Ils peuvent aussi être « déchus » s’ils ne se montrent pas à la hauteur. Chaque gang a ses règles, ses lois et sa morale. On peut tuer un membre du clan adverse, mais la pire insulte pour un membre du gang, c’est d’être accusé d’avoir abattu un « civil »…

Ces adolescents trouvent dans ces bandes un sentiment d’appartenance à un groupe, une certaine sécurité et un réconfort qu’il ne trouve ailleurs. Hors société, ces jeunes mafieux ne demandent rien sauf le droit de vivre dignement et dans la sécurité. Exister pour être protégé et reconnue dans la loi et les droits constitutionnels de leur pays.

Ces gangs vivent de trafics de drogues, d’armes et violences. Pourtant les autorités développent d’importants moyens et font face à ces gangs. Mais ce n’est pas assez. Livré à eux-mêmes, ce n’est plus une vie mais de la survie ! Vingt années après la guerre de San Salvador, une autre est apparue mais opposants les pauvres au pauvres dorénavant.

Marine Drillard

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire